LA LÉGENDE DE SAINT-FRIS
Auteur inconnu |
LA LÉGENDE PRESQUE VRAIE
Il fut un temps où Jean descendait de Poitiers vers les Pyrénées. En ce temps là, il était surnommé le Frisé. Car Jean était frisé. Le peuple a du bon sens. Le Frisé, donc, se trouva un jour en un lieu nommé l'Étendard. Car en ce lieu était planté un étendard. Le peuple est pragmatique. C'est donc en ce lieu qu'il fit la rencontre de Abder, qui venait lui aussi de Poitiers et qui avait l'habitude de ramer dur. On l'appelait donc Abder Ramant. Le peuple n'est pas très imaginatif. Or, le Frisé et le Ramant avait un vieux compte à régler. En effet, à Poitiers, ils avaient déjà fait connaissance et n'avaient pas fait ami-ami. Cependant, Abder, à force de ramer, avait de gros biscottos, alors que Jean, à force de friser, n'avait que des petits peignes. Jean, n'écoutant que son courage légendaire, préféra jouer la ruse. C'est ainsi qu'il décida de passer incognito devant Abder en se déguisant en demoiselle. Mais Jean, qui n'était pas une flèche, laissa ses frisotis dépasser de son décolleté plongeant. Et le Ramant, qui avait l'œil vif et le zizi lubrique, découvrit la supercherie lorsqu'il vit, à son grand désarroi, les poils tournoyants. C'est ainsi que le sein frisé perdit Jean. D'un poing rageur, Abder assomma Jean, et Jean fit un petit somme forcé à côté d'un pont. Plus tard, pour ne pas oublier ce dodo mythique, le pont fut nommé le Pont du Crétin. Le peuple est rigolo.
Et c'est ainsi qu'est née la terrible légende du sein frisé.
LA VRAIE LÉGENDE
Il fut un jour où Fris, fils de Rabbod, roi des Frisons, se convertit au christianisme. Mais cela déclencha la colère de son père et, pour échapper à son courroux, le jeune homme dût s'exiler et trouva refuge auprès de son oncle, Charles Martel.
Ce fut ainsi que, en l'an 732, Charles Martel, qui venait de battre l'armée d'Abder Rhaman à Poitiers, envoya Fris à la poursuite de ses ennemis qui retournaient en leurs terres en se dirigeant vers les Pyrénées. L'armée d'infidèles suivait l'antique chemin de crêtes de la Ténarèze qui reliait la Garonne au Port d'Ourdissétou, au-dessus de la Vallée du Rioumajou, quand la troupe commandée par Fris rattrapa l'arrière-garde au cœur de la Gascogne.
A la vue des mécréants, le jeune homme, enflammé de zèle et bouillant d'ardeur
se jeta sur eux et fit un horrible carnage. Tout pliait sous ses
coups et la frayeur s'emparait des sarrasins dont les rangs volaient en éclats. Ce fut alors que Abder Rhaman accourut en personne à la tête de renforts
considérables. Il ramena l'ordre parmi les siens et força les chrétiens à
fuir à leur tour. N'écoutant que son courage, Fris protégea la retraite de ses hommes avant de les rejoindre.
Peu après, arrivé sur le lieu qui, bien plus tard, prendra le nom de l'Étendard, Fris planta sa bannière et harangua ses hommes avec ferveur. Ceux-ci, galvanisés par la fougue de leur chef, se rallièrent à lui. Puis, leur courage retrouvé, ils se ruèrent à nouveau sur leurs ennemis et le combat reprit. Cependant, alors que l'affrontement, rude et terrible, voyait les Francs prendre l'avantage sur leurs adversaires, Fris fut soudainement frappé d'une flèche mortelle. Son cheval l'emporta au-delà du champ de bataille, sur les bords de la petite rivière de la Guiroue, à proximité d'un pont qui, plus tard, sera nommé le Pont du Chrétien. Et ce fut là que le courageux héros rendit l'âme, alors qu'il entendait, au loin, la clameur de ses hommes qui venaient de remporter la victoire. Ses compagnons finirent par retrouver son corps et l'ensevelirent en ce lieu.
Les années passèrent, puis les siècles. Le souvenir de la bataille et des Francs exaltés par le valeureux Fris resta vivace dans les mémoires, mais l'emplacement de sa sépulture tomba dans l'oubli. Mais, deux cents ans plus tard, un paysan des environs fut intrigué par le comportement d'une de ses vaches. Jamais cette bête ne prenait de nourriture et pourtant elle était la plus belle du troupeau. Il la surveilla et constata qu'elle allait lécher chaque jour une pierre dissimulée dans les broussailles. Le paysan dégagea la pierre et découvrit un sarcophage de pierre. Ayant soulevé le couvercle, il se trouva en présence du corps d'un guerrier encore recouvert de son armure, avec son casque et toutes ses armes. Et, à l'instant même de sa découverte, une fontaine jaillit du sol. Alors l'homme, se souvenant de la bataille qui s'était jadis livrée ici, ne douta pas un seul instant qu'il venait de découvrir la sépulture de Fris, le saint martyr, mort au nom de la chrétienté. Avec ses voisins accourus, ils décidèrent de lui donner un tombeau plus digne et prirent la décision de l'amener à quelques centaines de mètres de là, au lieu dit Tapia, où se dressait une petite église.
Le jour du transfert arriva et, en présence d'une grande foule, le sarcophage fut hissé sur un char auquel était attelé les bœufs les plus beaux et les plus forts du pays. A la stupéfaction générale, ils furent pourtant incapable d'ébranler le char. Alors quelqu'un suggéra d'atteler la petite vache qui venait lécher la pierre. Seule et sans effort apparent, elle amena sa charge jusqu'à l'église de la Tapia où le sarcophage fut déposé. Depuis ce jour, les miracles se succédèrent en ce lieu et l'eau de la fontaine qui avait jailli du sol fut réputée miraculeuse. Depuis ce jour, les pèlerins ne cessèrent de venir en nombre.
(FP, VB, FL).
LA LÉGENDE ET LE RÉEL
Il semble que le nom véritable du saint soit inconnu et que le nom de Fris ne lui fut donné qu'à posteriori. En effet, il aurait été appelé Fris, ou Frix, du nom de la Frise, la région où il était né. Son casque aurait aussi été surmonté d'une couronne en mémoire de la naissance royale que lui attribuait la tradition. Le nom du saint n'aurait pas tardé à se répandre dans la région autour de Bassoues, où se serait déroulé l'affrontement de la légende, et plusieurs églises l'auraient ainsi choisi pour leur patron. Il semble que le plus ancien missel connu du diocèse lui consacrait une messe particulière. Le culte de Saint-Fris aurait ainsi traversé les âges (FP).
La présence d'une source dans la légende provient de la vénération que les hommes ont toujours vouée à l'eau surgissante, symbole de la fertilité et de la fécondité, et que l'Église a cherché à christianiser depuis ses origines (3SPB).
L'église de Tapia, où aurait été amené le sarcophage de Saint-Fris, serait l'ancienne église sur les fondations de laquelle fut ensuite édifié la Basilique Saint-Fris (VB).
-> voir les infos sur la Basilique Saint-Fris.
Le lieu où fut découvert le sarcophage de Saint-Fris et où aurait jailli la fontaine, serait la Source miraculeuse de la Chapelle de Saint-Fris, au bord du Lac de Saint-Fris (FL).
TOPOS
Les topos du Bouquetin Boiteux en rapport avec la légende de Saint-Fris.Itinéraire | Km | D+ | Altitude max | D+/Km | Cotation | Chiens |
---|---|---|---|---|---|---|
Lac de Saint-Laurent, Bassoues, Basilique Saint-Fris, Lac de Saint-Fris | 14,5 | 250 | 250 | 17,24 | T1 | Autorisé |
SOURCES
FP : France Pittoresque. Site internet.VB : Village de Bassoues. Site internet.
FL : Fontaine Saint Fris. Fontaines des Landes. Site internet
3SPB : Saints, sources et sanctuaires du Pays Basque. 1995. (Olivier de Marliave / Editions Aubéron)
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